La guinguette
Au premier abord, ce mot guinguette fait ressurgir du passé des fantômes à casquettes, des cigarettes au coin du bec, des musiciens désargentés, le tout arrosé de vin clairet qui troue l’estomac. On voit des images de films en noir et blanc, des prolos en goguette, des barques à fond plat et des flopées de musique ringarde distillée par un accordéon. Ce serait le patrimoine des papimamis qui hantent les maisons de retraite à la recherche des paroles de cette chanson qu’ils aimaient tant et qu’ils ont oublié.
Mais si nous revenons à aujourd’hui, derrière ce mot se cache une manière de vivre. La guinguette, l’esprit guinguette, c’est en fait un art de vivre la fête populaire. En tant que tel, cet art de la fête est intemporel. Avec son côté bon enfant, l’esprit guinguette revendique peu de formalisme et peu de moyens. Tout le monde est acteur et spectateur à la fois. Tout le monde danse, regarde les autres danser, chante, écoute la musique ou se réjouit d’être là immergé dans l’ambiance.
La fête appartient à tous ceux qui sont présents et tous y participent.
Dans cette fête populaire, celle des plaisirs simples, des chansons et des danses partagées sans souci de la performance ou du spectacle, tous les niveaux de compétence sont permis. Même si certains attireront les regards, dans l’ombre, chacun trouve sa chacune.
Façon de faire le chant, la danse, mais aussi art de la table … mise au débotté, on mange, on boit à la bonne franquette.
L’esprit guinguette, c’est encore le plaisir de se retrouver dans un lieu familier ni chez soi ni dans la rue. Là où on a ses habitudes, là où on connait les habitués .
L’esprit guinguette ne demande qu’à sortir du passé et de la nostalgie. Il n’est pas uniquement une affaire de seniors en mal de retraite joyeuse. Cette envie de partage des réjouissances simples appartient à tous. Les musiques, les films, les danses changent, mais ce désir de convivialité simple ne change pas. De ce fait, il est un vecteur de partage entre les générations.
Aujourd’hui, les vieilles chansons françaises, dites chansons réalistes sont partagées avec plaisir par tous les âges. On s’y retrouve dans la simplicité et l’expérience partagée de tous ces sentiments qui mettent le cœur à l’envers.
L’accordéon, longtemps mis sur la touche reprend petit à petit une place de choix auprès des musiciens.
La danse de couple, malmenée par toutes ces années de discothèque, laisse les jeunes, sur le bord de la piste mi moqueurs mi intéressés.
Aussi redonnons à l’initiation toute sa place. Dans cet esprit, elle ne peut pas prendre la forme d’un cours magistral. Il nous faut donc retrouver le chemin d’un « savoir faire les danses », danses de couples et danses de groupe qui font le terreau de l’esprit guinguette et un savoir « faire le bal » qui s’est perdu quand les pistes de danse ont été envahies par les danses solitaires ou la solitude tout simplement. Le bal populaire est un lieu de rencontre social et festif avec des codes élémentaires qui s’apprennent sur et autour du parquet.
L’esprit guinguette à Aubervilliers
A Aubervilliers, plusieurs associations s’emploient à donner une place à ces moments de rencontres.
Autour de cet esprit guinguette, un collectif d’associations a vu le jour. Il organise depuis 4 ans des bals du dimanche. Autour de ces bals gratuits se construit petit à petit un lieu de retrouvailles.
A partir de cette expérience, le collectif se propose de faire vivre l’esprit guinguette au moment des journées du patrimoine 2014 et de prolonger la fête en installant régulièrement la Guinguette d’Aubervilliers dans les murs de la ville.
Cet évènement sera fait de rencontres, de fête bon enfant, de musique qui rend joyeux avec de vrais musiciens, de chansons aux refrains à chanter tous ensemble, de danseurs du dimanche et de tables avec nappes à carreaux.
Qu’on se le dise : la guinguette d’aujourd’hui est vivante et elle ouvre ses portes au Théâtre des Frères Poussière pour ces deux belles journées de Septembre.
Brigitte
Avril 2014